
« Les causes lointaines de la décolonisation se retrouvent dans les modalités des conquêtes coloniales elles-mêmes, ne serait-ce que parce que celles-ci vont définir les frontières des futurs États aux degrés de souveraineté variables dans les années 1960. Des fédérations politiques relativement intégrées, souvent administrées par des États précoloniaux depuis plusieurs siècles, furent ainsi partagées entre les possessions coloniales. Tel fut le cas du royaume chrétien du Kongo dont une partie se trouve dans l’actuel Angola, une deuxième dans la république du Congo, une troisième dans la république démocratique du Congo et une autre dans le Gabon. Il en est de même des groupes culturels et linguistiques comme les Wolofs et les Sérères partagés entre le Sénégal, colonie française, et la Gambie anglophone.
La violence des conquêtes coloniales et des premières résistances africaines constituent l’essentiel de l’iconographie nationaliste qui se développa pleinement au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Quitte à quelques arrangements avec l’histoire, il en est ainsi de Samori Touré (1830-1900), dont l’ambition de construire un empire à la fin du xixe siècle en Afrique de l’Ouest se heurta à l’extension du domaine colonial français dans la même région. Il en est de même de Behanzin (1844-1906), 11e roi d’Abomey, anciennement Dahomey devenu actuellement le Bénin.
Par la suite, les méthodes de la colonisation seront aussi déterminantes dans les décolonisations. Le caractère tardif et violent de la décolonisation portugaise n’est qu’une réponse aux manières de coloniser… »
- Pierre Brocheux, Samya El Mechat, Marc Frey, Karl Hack, Arnaud Nanta, Solofo Randrianja, Jean-Marc Regnault
- Dans Les décolonisations au XXe siècle (2012), pages 195 à 211